Le pervers narcissique : un fin tortionnaire selon les critères de l’ONU
On imagine souvent la torture comme une scène de guerre, un interrogatoire brutal, des sévices infligés par un bourreau à sa victime. Pourtant, la torture ne se limite pas aux violences physiques. L’ONU la définit comme :
« Tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales, sont intentionnellement infligées à une personne… »
(Convention des Nations Unies contre la torture, 1984)
Autrement dit, la souffrance psychologique infligée volontairement entre pleinement dans cette définition. Et c’est exactement ce que l’on retrouve dans les relations d’emprise avec un pervers narcissique.

La torture psychologique, une arme invisible
Les experts des droits humains décrivent plusieurs techniques de torture psychologique utilisées dans les régimes autoritaires ou les prisons :
- Isolement social
- Humiliation et rabaissement
- Gaslighting (privation de repères, contradictions)
- Menaces voilées ou explicites
- Privation de sommeil, d’intimité, de sécurité
- Alternance entre violence et réconfort
- Destruction progressive de l’identité
Ces méthodes, destinées à briser la volonté d’un individu et à le soumettre, se retrouvent de manière troublante dans le quotidien des victimes de pervers narcissiques.
Le pervers narcissique : un bourreau domestique
Dans le couple, la famille ou le travail, le PN déploie les mêmes stratégies qu’un tortionnaire, mais sous des formes banalisées et insidieuses.
- Isolement : il éloigne sa proie de ses proches, crée des conflits pour la couper de son réseau de soutien.
- Humiliation : il la rabaisse, se moque, ridiculise ses opinions ou son apparence.
- Gaslighting : il déforme la réalité, contredit, ment avec aplomb pour faire douter sa victime de sa mémoire et de son jugement.
- Menaces et chantage affectif : rupture, abandon, trahison, retrait d’amour conditionnent son contrôle.
- Incertitude permanente : il souffle le chaud et le froid, offrant parfois une tendresse soudaine après des jours de cruauté.
- Destruction identitaire : peu à peu, la victime perd sa confiance, son autonomie, sa dignité.
Même si dans leur tête le PN ne se voit pas toujours comme un bourreau, il sait que ses actes provoquent souffrance et dépendance. La torture psychologique n’est pas forcément intentionnelle pour le plaisir : c’est souvent un mélange d’habitude, de calcul et d’obsession pour le contrôle. Mais le résultat concret pour la victime correspond aux critères de torture mentale de l’ONU.
Une torture banalisée
La grande différence, c’est que ces techniques sont dénoncées lorsqu’elles sont pratiquées par un État ou une armée, mais ignorées lorsqu’elles se déroulent dans l’intimité du couple, d’une famille ou d’un bureau. La souffrance psychique est invisible, difficile à prouver, souvent minimisée par l’entourage ou par les institutions.
Pourtant, les conséquences sont identiques :
- Stress post-traumatique complexe (C-PTSD)
- Dépression sévère
- Perte d’identité
- Pensées suicidaires
- Dépendance affective comparable à une captivité
La justice face à l’emprise PN
La justice peine à traiter ces situations. Les violences psychologiques laissent rarement de traces tangibles, et la loi ne reconnaît pas encore la torture domestique au même titre que la torture d’État. Même lorsque les victimes portent plainte, elles doivent démontrer la répétition et l’impact de ces comportements, ce qui est complexe.
Les conséquences psychiques sont parfois reconnues dans le cadre de la maltraitance ou du harcèlement, mais la protection et la sanction restent limitées, laissant de nombreuses victimes sans recours suffisant. Pourtant, la reconnaissance judiciaire de ces violences pourrait contribuer à casser le silence et mieux protéger les victimes.
Reconnaître l’emprise comme torture
Le pervers narcissique n’est pas un simple manipulateur habile : il est l’équivalent d’un tortionnaire psychologique, utilisant des méthodes que l’ONU reconnaît comme relevant de la torture mentale. Même si l’intention de nuire n’est pas toujours consciente dans son esprit, le résultat sur la victime est bien réel et destructeur.
La société gagnerait à nommer les choses et à reconnaître l’emprise psychologique comme une forme de torture domestique, afin de mieux protéger les victimes et de briser le silence.
Astrid
Secrets du Bonheur